Après
un petit réchauffement dans les relations maroco-algériennes suite
notamment au printemps arabe, la chape de plomb semble se
rabattre sur les relations entre les deux que paradoxalement tout rapproche.
Dans les
années 90 appelées années noires ou années sombres en Algérie, après avoir déposé mes
enfants à l’école à Rabat avant d’aller au travail, j’avais sur mon
chemin le bâtiment abritant l’ambassade d’Algérie et le drapeau algérien
qui flottait sur la colline surplombant le fleuve du Bou Regreg séparant
Rabat de la ville de Salé. Chemin faisant, il m’arrivait d’écouter la
radio Médi1 (émettant de Tanger et dont les émissions sont destinées aux
pays du Maghreb). Celle-ci faisait le bilan de la veille tel
que rapporté par la presse algérienne, des massacres perpétrés par les
groupes terroristes au cours desquels femmes, enfants et vieillard étaient
sauvagement assassinés. Ces nouvelles macabres me bouleversaient à tel
point que j’arrivais à mon travail avec des lunettes de soleil pour cacher mes
yeux et me voyant ainsi, des collègues ricanaient sous cape croyant à tord
que j’avais picolé la veille.
Or la
réalité était tout autre pour moi car le massacres des enfants étaient
insupportables alors que je venais de déposer les miens à l’école. Le
fait était en outre doublement pénible car les groupes terroristes se
réclamaient de la religion musulmane( ma religion) mais surtout s’agissant
d’un pays frère , le plus proche de nous car notre génération
instruite par celle nos parents et pour lesquels l’indépendance
du Maroc en 1956 n’a été effective qu’avec l’indépendance de
l’Algérie en 1962.Cette relation de sympathie et de fraternité avec
ce pays avait aussi pour origine la guerre de libération pour
retrouver l’indépendance face à une puissance coloniale qui contrairement aux
protectorats marocain et tunisien considérait l’Algérie comme territoire
français et a essayé de gommer l’identité arabe, amazigh et musulmane de ce
pays tout en traitant ses habitants de citoyens de second
ordre.
Depuis,
beaucoup d’eau a coulé sous les ponts du fleuve du Bou Regreg( cité), l’Algérie a
gagné sa bataille contre le terrorisme qui est devenu résiduel mais ses
relations avec le Maroc ont continué à se détériorer enterrant de ce
fait l’idéal maghrébin. Car le système sécuritaire militaire qui a mis au
pas les groupes terroristes s’est trouvé de ce fait renforcé. De son cité,
le président Bouteflika est resté sur des schémas de guerre froide lui qui
était ministre des affaires étrangères de son pays dans les années 70.En effet,
d’après les documents deWikileaks sur l’Algérie rapportés par
le presse algérienne, le président « Bouteflika est son
propre ministre de l’Extérieur, et sa conception politique régionale n’a pas
évolué depuis les années 1970 ». « La seule approche de
Bouteflika et de son équipe est la dépense de milliards de dollars dans des infrastructures
et des projets grandioses ». En vain. La raison, en est, selon les
diplomates « la bureaucratie, les lourdes réglementations, la
centralisation ralentissant les projets et empêchant les nouveaux
investissements privés ».Il y a « un manque de vision au
sommet ». « Bouteflika et son équipe ne savent pas que s’ils veulent
que l’Algérie intègre l’économie de marché mondiale, ou si le gouvernement doit
perdurer dans le contrat social des années 1960-1970 », est-il affirmé
dans le document.
En prenant
ces jugements avec précaution, force est de constater que le Président
Bouteflika a réussi à faire sortir son pays de cette décennie noire du
terrorisme et c’est ce que gardera peut être l’histoire de son passage à la
tête de l’état algérien ; mais il n’a tout de même pas réussi jusqu'à
présent à mettre les algériens au travail et a maintenu le pays renfermé
sur lui-même sans normaliser ses relations avec ses voisins. Or, des
économistes surtout algérien ne cessent pointer du doigt cette sorte
« d’autarcie » dans laquelle évolue l’économie algérienne et qui
n’est plus compatible avec la mondialisation, car le pays ne peut plus se
contenter de gérer la rente pétrolière, il est appelé à diversifier son
économie pour préparer l’après pétrole.
Coté marocain,
avec son arrivée au pouvoir en 1999, Mohammed VI a demandé la normalisation des relations
avec l’Algérie. En tant que chef d’état, il a demandé l’ouverture des
frontières Est de son pays qui étaient fermées avant son arrivée au
pouvoir. Ses appels sont demeurés vains et la main tendue à l’Algérie est
restée sans suite car pour les officiels algériens cette
normalisation profiterait plus au Maroc qu’à l’Algérie. En fait , la
raisons est toute autre car cette fermeture des frontières apparait de
plus en plus liée au conflit saharien.
En effet,
l’Algérie tout en affirmant officiellement que la conflit du Sahara concerne la Maroc et
le Polisario, que c’est une affaire des Nations Unies consacre des
millions de dollars à ouvrir et faire fonctionner les « ambassades »
et autres bureaux du Polisario à travers le monde et financer différents
lobbies pour soutenir « la cause sahraoui », , tout en
achetant pour des dizaines de milliards de dollars d’équipements militaires
dont une partie bénéficiera aux combattants du Polisario
alors que les populations sahraouies refugiées en territoire algérien à Tindouf
en Algérie continuent de vivre dans des conditions misérables en dépit de
l’aide internationale notamment européenne qui leur est allouée.
Cette
situation devait durer ainsi mais c’était sans compter avec l’arrivée du
printemps arabe, le Maroc et l’Algérie ont commencé un timide rapprochement
avec l’échange de visites de ministres en charge de l’agriculture et de
l’énergie notamment. Ces visites se sont conclues par des accords aux termes
desquels l'Algérie fournira du gaz naturel au Maroc. Cet accord prévoit la
fourniture de 640 millions de mètres cubes de gaz par an à deux centrales
électriques hybrides : Aïn Beni Mathar à Jerada, près de la frontière
algérienne, et la centrale de Tahaddart, près de Tanger. Ce gaz transitera par
le gazoduc Pedro Duran Farell qui relie les champs gaziers de Hassi R'mel à
l'Espagne, via le Maroc. Sur le plan électrique, les deux pays
sont connectés à l’Europe via une liaison entre le Maroc et l’Espagne.
Mais
au début de cette année, le nouveau ministre des affaires étrangères marocain
a consacré sa première visite à l’étranger à Alger. Ce voyage a abouti à
la mise en place d’une commission politique mixte qui se réunira deux fois par
an, la poursuite des travaux des commissions sectorielles déjà existantes,
Agriculture, Eau et Jeunesse et Sports, l’extension de cette démarche à
d’autres domaines dont l’Energie, l’Education, l’incitation à la mobilisation
de part et d’autre des sociétés civiles et des médias pour un dialogue et des
partenariats et, enfin, la réunion de la Grande Commission Mixte avant la fin
de 2012, sachant que cette dernière ne s’est pas réunie depuis 1994.En fait,
rien de vraiment concret.
Nous sommes
vers la fin de l’année et personne ne parle plus de la réunion de cette grande commission mixte
ni des commissions sectoriels. Même les accords de coopération de
complémentarité conclus déjà tant sur le plan bilatéral que dans
le cadre de l’Union du Maghreb Arabe sont restées lettre morte. La chape de
plomb est donc retombée sur les relations
maroco-algérienne ; mai a-t-elle été jamais remontée de puis les années
70 ?
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